S'il est un endroit incontournable au Mans, c’est bien le petit bar 'Aux portes du Circuit'. Plus communément désigné 'Chez Jeannine'. Cette institution est blottie à un jet de houblon de l’entrée principale du vénérable circuit sarthois. La maîtresse des lieux, Jeannine Belnou, accueille ses clients, devenus pour la plupart ses amis.
L’aventure débute en 1975, millésime de la deuxième victoire de Jacky Ickx dans la Sarthe. Ici, tout est impeccable, y compris le regard bienveillant de cette dame énergique. Quand elle ouvre le tiroir aux souvenirs, nous tombons instantanément sous le charme. Proche du grandissime Henri Pescarolo, qui adopte une fois pour toutes le bistrot pour y prendre son petit déjeuner, sensible à la générosité de la patronne. On y croise Daniel Poissenot, l’ancien directeur de course des 24 Heures.
C’est au coin du comptoir que l’on ne manquait pas jadis le regretté Michel Bonté, un des plus fins historiens des 24 Heures. Cet homme infiniment gentil portait admirablement son nom. Le journaliste emblématique du quotidien local 'Le Maine Libre' a signé une belle brochette d’ouvrages, réalisés avec une grande sensibilité. Michel veillait au confort de Paul Frère et gardait jalousement son pupitre. La salle de presse du Circuit du Mans lui rend hommage, en s’appelant désormais 'Salle de presse Michel Bonté'.
'Aux portes du Circuit', c’est aussi une halte obligée de SAS le Prince Albert de Monaco et de son épouse, SAS la Princesse Charlène.
Il serait fastidieux de lister les personnalités qui ont franchi les portes du temple.
Le jeudi matin, les chasseurs du cru prennent leur petit-déjeuner, avec une plantureuse tête de veau… Cette coutume est aussi surprenante que sympathique, elle surprend toujours les novices.
Une petite histoire Belge se glisse dans celle du cabaret estampillé 'Racing'. C’est le rendez-vous des commissaires noir-jaune-rouge, l’un d’entre eux exécute un jour une généreuse marche arrière et percute le poteau supportant l’enseigne… Depuis une vingtaine d’années, ses copains menés par le sémillant Bruxellois Marcel Van Ipper, dit 'Marcel le coiffeur', procèdent à la 'cérémonie du poteau'. Un petit autocollant tricolore surmonté d’une plaquette gravée, rappelle l’événement.
Nous avions bien cru que l’aventure serait terminée en 2023, Jeannine souhaitait prendre sa retraite.
Un accord est pris avec l’A.C.O., qui achète cet établissement culte faisant l’objet d’un classement. Le but est de garder l’esprit et le caractère historique, mais aussi d’utiliser le terrain adjacent pour y construire une infrastructure hôtelière.
Cette année, nous avons eu le plaisir de retrouver notre inaltérable Jeannine, fidèle à ses pompes à bière et toujours au petit soin pour ses amis. (Christophe A. Gaascht)